Dans ce climat morose pour les entreprises, considérer le développement comme un levier possible de différenciation commerciale et marketing, voire comme une opportunité d’affaire, relève de l’exploit. Si l’on se fie à l’analyse sémantique du discours corporate des entreprises en matière de développement durable (Ujjef/Inférences, 2010), les services de communication se sont bien emparés du sujet et l’ont parfaitement intégré dans leur discours.
Pour autant, tant que le développement durable ne sera pas partie prenante dans la stratégie des entreprises, nous continuerons à constater une absence de prise en compte d’indicateurs complexes (notamment ceux liés à l’image de l’entreprise et à la RSE) au profit d’une logique, certes légitime, basée sur la seule performance économique de l’entreprise. L’étude réalisée par l’Ujjef et Inférences en 2010 fait apparaître des paradoxes de compréhension et la non intégration du développement durable dans l’ADN des entreprises.
Les dirigeants affirment par exemple, dans des discours lisses et attendus, un rejet du court-termisme mais n’apportent aucune vision stratégique du développement durable. La crise est citée 73 fois dans le discours des dirigeants, soit près de la moitié des occurrences du corpus global de l’étude (les rapports annuels publiés en 2009), mais c’est surtout pour expliquer que le contexte, défavorable, fait subir de fortes pressions sur l’entreprise, et donc à justifier des choix à court-terme.
Pouvons-nous blâmer ces dirigeants d’entreprise ? Quand on estime que son entreprise est au niveau « survie » de la pyramide de Maslow, est-ce qu’il est facile d’écouter ceux qui n’apportent pas des promesses d’injection massive de liquidités et de garantie sur les actifs dévalués ? C’est donc uniquement en étant un vecteur de création de valeur pour une entreprise que le développement durable permettra de créer de la valeur pour toutes les parties prenantes (clients, fournisseurs, employés, etc.).
Paul Polman, PDG d’Unilever, l’entend bien de cette oreille, lui qui, au plus fort de la crise, martelait « Sustainable Living Plan » et se lançait dans la réduction drastique des consommations de ressources naturelles (-50% de CO² en dix ans), dans l’amélioration des pratiques au cœur de sa supply chain et dans le soutien des petits exploitants agricoles et distributeurs.
Comme le dit Xavier Houot [1], « Si le « prisme développement durable » n’est pas le seul et unique moyen de regarder différemment son marché ou son modèle économique, reconnaissons tout de même qu’il en est un fabuleux catalyseur, au travers de son ouverture sur les parties prenantes, l’environnement naturel, la société et le monde de demain. ».
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Bibliographie et notes
Ujjef / Inférences, 2010, « Analyse sémantique du discours corporate des entreprises sur le développement durable », [en ligne], http://www.inferences-conseil.com/PDF/Etude3-Synthese-Ujjef-Inferenecs-HD.pdf, consulté le 08/09/2014.
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